AS Entreprises et FDSEA Conseil travaillent avec les services départementaux pour résoudre des problèmes administratifs très pénalisants pour les entreprises : lenteur d’actualisation des extraits Kbis, des enregistrements d’actes, dysfonctionnements du Guichet unique, cas des GFA Mutuels. Point sur les avancées.
Suite aux actions des réseaux FNSEA et Jeunes agriculteurs et aux annonces du gouvernement, Thierry Fournaise, vice-président de la FDSEA 51 et président délégué d’AS Entreprises, a demandé à ses collaborateurs de travailler sur le sujet de la simplification administrative, avec les administrations marnaises concernées. Gilles Pellerin, directeur délégué d’AS Entreprises et Richard Gallot, responsable technique du pôle juridique de FDSEA Conseil, ont pris à bras le corps ce dossier. Ils livrent leur expérience et les premiers résultats obtenus.
Pouvez-vous nous rappeler le contexte dans lequel la FDSEA vous a demandé d’intervenir ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Suite aux premières mobilisations des agriculteurs, le Premier ministre a chargé les préfets de mener une concertation avec les agriculteurs afin d‘identifier toutes les mesures législatives et réglementaires qui pourraient faire l’objet d’une simplification administrative. La première réunion du 5 février 2024 entre le Préfet et les représentants de la FDSEA a permis de soulever plusieurs difficultés rencontrées par les agriculteurs dans leurs démarches administratives et de chercher ensemble des solutions.
Quels sujets avez-vous recensé et comment avez-vous fait pour les lister ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Nous avions déjà une bonne connaissance des difficultés rencontrées et nous avons fait appel à nos collaborateurs pour nous remonter tous les problèmes rencontrés.
Des adhérents attendent depuis plusieurs mois leur extrait Kbis suite à la création de leur entreprise ou d’une modification de leur statut de société. Or l’extrait Kbis est réclamé par de nombreux organismes/administrations pour s‘assujettir à la MSA, réaliser des options fiscales, bénéficier de subventions, réaliser un emprunt, remplir un dossier PAC. Le service juridique de FDSEA Conseil, qui réalise les actes, est régulièrement sollicité par les adhérents qui ne comprennent pas les retards de mise à jour des extraits Kbis.
Par ailleurs, des actes juridiques soumis aux droits d’enregistrement, tels que des actes de cession de parts sociales, de transformation de société ou de liquidation de société, sont en attente depuis plusieurs mois au centre des impôts. Les délais d’enregistrement sont anormalement longs et ralentissent la mise à jour des extraits kbis des sociétés via le Guichet unique des formalités d’entreprise. En effet, la formalité de l’enregistrement est préalable au dépôt du dossier via le Guichet unique.
De plus, nos juristes constatent de sérieux dysfonctionnements du Guichet unique qui a remplacé le Centre de Formalités des Entreprises (CFE) des Chambres d’agriculture à compter du 1er janvier 2023. Pour pallier ces dysfonctionnements constatés par l’ensemble des utilisateurs (experts- comptables, avocats, juristes…), des solutions ont été apportées au niveau national mais ne sont pas toujours opérationnelles pour les exploitations agricoles (pas de procédure de secours pour les entreprises individuelles agricoles).
Nous avons également recensé une difficulté au sujet de l’enregistrement via le Guichet unique des 2500 associés des 30 GFA Mutuels de notre département. En effet, s’agissant d’ une société à responsabilité indéfinie, la réglementation oblige les associés à s‘identifier auprès du Registre du commerce et des sociétés en mentionnant plusieurs informations. Compte tenu du nombre d’associés par GFA Mutuel, cette obligation entraîne un surcroît de travail considérable.
Le Guichet Unique c’est quoi ?
C’est l’interface informatique qui permet de déposer une formalité d’entreprise depuis le 01/01/2023 (création/modification/cessation d’entreprise). Elle remplace les Centres de Formalités des Entreprises (CFE). Elle est gérée par l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).Concrètement quelles administrations avez-vous rencontrées ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Nous avons contacté les interlocuteurs du département pour leur présenter et trouver des solutions à court terme pour les dossiers en suspens, mais aussi durables pour les dossiers à venir.
Ainsi, nous avons pris contact avec Monsieur Soulié Bruno, Directeur Départemental des Finances Publiques de la Marne et avec Maître Pierre Di Martino, Greffier du Tribunal de Commerce de Châlons-en-Champagne.
Comment avez-vous été accueillis ? Les administrations ont-elles mesuré l’ampleur des problématiques soulevées ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Au cours des deux rendez-vous que nous avons eus, nous avons rencontré des interlocuteurs à l’écoute des problèmes et qui ont cherché, avec leurs équipes, des solutions pragmatiques et immédiates pour débloquer les dossiers.
Avez-vous déjà obtenu gain de cause sur certains sujets ? Des solutions sont-elles en passe d’être trouvées ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Monsieur Soulié a contacté immédiatement les services concernés pour traiter les dossiers les plus urgents et nous a informés que des mesures seront prises pour raccourcir les délais de traitement des actes soumis à la formalité de l’enregistrement. Nous avons déjà pu constater que la durée de retour des actes du service de l’enregistrement s’était réduite, ce qui nous a permis de saisir plus vite les dossiers sur la plateforme du Guichet unique des formalités. S’agissant des dysfonctionnements du Guichet unique, qui est un problème national, des développements sont en cours pour le rendre opérationnel. Dans l’attente, le directeur départemental des finances publiques de la Marne nous invite à reprendre la procédure papier en cas de dysfonctionnement.
Monsieur Di Martino et sa collaboratrice nous ont également apporté des réponses très concrètes sur les dossiers présentés. S’agissant des associés de GFA Mutuel, nous avons trouvé ensemble une solution de dépannage pour répondre aux obligations déclaratives, en attendant une solution plus pérenne.
Quels chantiers reste-t-il à mener ? Pensez-vous qu’ils pourront rapidement être solutionnés ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Si des solutions à court terme ont été apportées, il reste à dégager des moyens humains et matériels pour améliorer les services publics. A défaut, les agriculteurs et viticulteurs risquent de rencontrer à nouveau les mêmes difficultés.
Nous déplorons la mise en œuvre du Guichet unique des formalités d’entreprise. Cette réforme importante avait été actée dans la loi PACTE de 2019 avec la création du Registre National des Entreprises. Ce projet avait été confié par l’Etat à l’INPI. Dans un rapport publié à l’automne 2023, la Cour des Comptes a dénoncé un véritable fiasco : pilotage inadapté et planning irréaliste. De nombreux dysfonctionnements demeurent, même si la situation s’est améliorée depuis le 01/01/2023.
La FDSEA de la Marne rapporte très régulièrement les problèmes à la FNSEA pour qu’ils soient communiqués au Ministère de l’Economie et des Finances. Ils sont également transmis au comité des utilisateurs du Guichet Unique. Nous essayons d’influer sur les process décidés dans des comités de pilotage. Nous nous sommes aperçus qu’en matière de modification/cessation de sociétés agricoles, la MSA n’avait l’information que si elle allait la chercher sur le Registre National des Entreprises (RNE), ce qui n’est pas fait et nous oblige à l’informer séparément. La FDSEA de la Marne demande donc que la MSA soit notifiée directement de tous les dossiers agricoles transitant par le Guichet Unique. C’est le processus qui existait avec les CFE…
Pour conclure, quel est votre état d’esprit aujourd’hui ?
Gilles Pellerin et Richard Gallot : Nous tenons à remercier toutes les personnes rencontrées au cours de cette action, pour la qualité de leur écoute, leur bienveillance et leur réactivité. Nous resterons en contact avec elles pour régler régulièrement les difficultés rencontrées. Nous espérons que l’Etat mettra en œuvre les moyens nécessaires pour améliorer le fonctionnement global des services et des outils.
Le Registre National des Entreprises, c’est quoi ?
Ce registre identifie depuis le 01/01/2023 l’ensemble des entités ayant une activité économique au sens de l’art. L123-36 du code de commerce. Il confère la qualité d’artisan car il remplace le répertoire des Métiers, ou la qualité d’actif agricole. Il est géré par l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI). Certains registres comme le Registre du Commerce et des Sociétés pour les sociétés et les commerçants sont maintenus.